Pendant longtemps, on a cru que la santé bucco-dentaire se limitait à une question d’esthétique ou de caries. Une dent douloureuse, un abcès, un saignement de gencives… on soigne localement, on soulage, et on passe à autre chose. Mais si ces symptômes étaient en réalité les premiers signaux d’un déséquilibre plus profond ?
Aujourd’hui, les recherches le confirment : la bouche ne parle pas seulement des dents. Elle raconte l’état général du corps.
Quand la bouche parle au cœur (et au reste du corps)
C’est un fait encore sous-estimé : 3,5 milliards de personnes dans le monde souffrent de maladies bucco-dentaires. Et dans bien des cas, ces affections ne s’arrêtent pas à la cavité orale.
Des études ont montré qu’une parodontite non traitée double le risque d’infarctus, tandis que sa prise en charge améliore le contrôle du diabète. Les chercheurs ont même retrouvé des bactéries buccales dans certaines lésions cardiaques. Autrement dit, la bouche est une porte d’entrée vers le corps, et son inflammation peut avoir des répercussions bien au-delà du sourire.
Ces liens ne sont pas des hypothèses : ils sont documentés par l’Organisation mondiale de la santé, la Fédération Européenne de Parodontologie et la World Heart Federation. Pourtant, dans de nombreux cabinets, ils restent encore absents des réflexes de prise en charge.
Pourquoi cette vision globale peine-t-elle à s’imposer ?
La réalité, c’est que la médecine s’est longtemps construite par spécialités. Le dentiste s’occupe de la bouche, le cardiologue du cœur, le diabétologue du pancréas. Résultat : chacun travaille dans son couloir, avec peu de passerelles entre les disciplines.
Et lorsqu’on évoque les liens entre gencives et cœur, beaucoup de praticiens répondent encore que “c’est trop flou” ou “pas totalement prouvé”. Pourtant, ignorer ces interactions, c’est passer à côté d’une information précieuse pour le suivi du patient.
En France, moins d’un patient sur deux consulte un dentiste chaque année, souvent trop tard. Le soin devient alors curatif plutôt que préventif, alors qu’une vision intégrée permettrait de détecter des signaux d’alerte avant l’apparition de complications systémiques.
Une autre voie : reconnecter la bouche au reste du corps
C’est précisément ce que défend depuis plus de trente ans l’association ODENTH. Fondée par des praticiens convaincus que la bouche ne peut être séparée du reste de l’organisme, ODENTH organise en mai 2026, à Aix-en-Provence, son congrès annuel scientifique interdisciplinaire.
Des chirurgiens-dentistes, médecins, posturologues, nutritionnistes, ostéopathes ou spécialistes en médecine complémentaire y partagent leurs expériences et leurs cas cliniques. Les échanges sont fondés sur des faits, des observations, des publications, et non sur des dogmes. L’objectif n’est pas de bouleverser la médecine dentaire, mais de réconcilier la rigueur clinique avec la compréhension du corps dans son ensemble.
Comme le résument souvent les participants :
“Ce n’est pas une révolution. C’est une réconciliation.”
Vers une dentisterie plus complète, plus juste, plus connectée
Cette approche globale n’oppose pas la science et l’expérience. Elle invite à relier les disciplines plutôt qu’à les isoler. Elle valorise une médecine dentaire préventive, systémique et humaine, où chaque symptôme buccal devient un indice sur l’état général du patient.
La bouche n’est pas une fin en soi, mais un miroir du corps. Un déséquilibre du microbiote oral peut révéler un terrain inflammatoire. Un saignement gingival peut traduire une résistance à l’insuline. Une haleine persistante peut signaler un trouble digestif.
Comprendre ces liens, c’est ouvrir la voie à une médecine plus fine, capable d’intervenir en amont, avant que les pathologies ne s’installent.
Un rendez-vous pour penser la santé autrement
Le prochain Congrès ODENTH se tiendra les 28 et 29 mai 2026 à Aix-en-Provence. Deux jours de conférences, d’ateliers et de retours d’expérience pour explorer les interactions entre la santé bucco-dentaire et la santé systémique.
Professionnels de santé, chercheurs et praticiens complémentaires y échangeront sur des approches cliniques concrètes, nourries de terrain et de science. Une occasion unique de repenser la place du chirurgien-dentiste dans le parcours global de soins et d’ouvrir la voie à une nouvelle génération de praticiens : plus informés, plus connectés et plus conscients des interrelations du corps humain.
Repenser la santé à partir de la bouche
La santé bucco-dentaire n’est pas une spécialité périphérique : elle est au cœur de la prévention. Loin d’un discours alternatif, cette approche systémique repose sur des preuves solides et une conviction simple : le corps ne fonctionne pas par compartiments.
Réconcilier la bouche et le reste du corps, c’est redonner du sens au soin, replacer l’écoute et la compréhension du patient au centre, et pratiquer une dentisterie à la fois rigoureuse et humaine.
